Critique Rap français Hiphop : Tiersmonde – Toby or not Toby – Esclave ou maître

Après l’excellente mix-tape « Black To the future », Tiers monde nous livre enfin son album intitulé « Toby or not Toby », un jeu de mots efficace et bien trouvé pour traduire le concept de cet opus qui vous pose la question, êtes-vous esclave ou maître ? Pour ceux qui n’auraient pas compris la subtilité du titre, voici une petite explication. Les esclaves africains une fois vendus à leurs « maîtres » étaient ensuite rebaptisés par ce dernier avec un nom généralement plus court. En 1767, c’est sous les coups de fouet que le guerrier mandingue Kunta kinté s’est vu renommé Toby par les esclavagistes blancs. Il vous suffit d’écouter l’introduction du projet signé Proof pour comprendre, une intro courte qui prend aux tripes et vous fera serrer les poings. Pour conclure, Toby symbolise l’esclave et phonétiquement se prononce comme « To Be », ce qui reprend la célèbre tirade d’Hamlet « To Be or not to Be » soit « être ou ne pas être ». Vous savez tout

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Le titre éponyme de cet album « Toby or not Toby » justifie à lui seul l’achat de l’album. Certainement l’un des meilleurs morceaux de rap français de ces dernières années, un texte puissant et un flow posé et millimétré. 6 minutes de pures vérités qui vous plongeront instantanément dans les champs de coton grâce à une production évolutive qui monte en puissance entre percussions et murmures chantonnés. Une véritable œuvre d’art, on vous conseille également de regarder le clip.

 

« T’es esclave si les médias pensent à ta place

Veulent faire passer pour une nonne Katsuni, Tabatha Cash

Confondent les imams et les prêtres

Les sentiments, les centimètres

Je suis qu’un homme sans idoles, le Tout Puissant est mon maître

Ici être ou ne pas être, l’oseille fait tourner la tête

L’argent est un bon serviteur mais un mauvais maître

L’argent reste un bon serviteur mais un mauvais maître »

 

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Nous parle de sa France bleu blanc vert jaune rouge dans laquelle il est difficile d’avoir des repères sur le titre BBVJR accompagné par Alivor. « Afro en Europe, Afro jusqu’à l’os, puis recolonisé par un Iphone Macintosh … je me sens nulle part chez moi, Perdu de la tête aux shoes comme un hijab dans une partouze ». Niveau featuring vous retrouverez Brav, l’autre moitié de Bouchées doubles sur le titre « et tu montes » ainsi que Soprano des Psy4 de la rime sur les discrètes touches de piano de « Block to the future ».

 

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Un coup de cœur pour le titre « négritune » dans lequel l’artiste tombe le masque et laisse parler une prod chargée en émotions signée une fois de plus Proof. Le texte du morceau « Minorité » qui démarre sur les craquements du vinyle, nous prend également aux tripes avec la discrète voix de Thelma « Plus les impacts sont violents, Plus la victoire est belle simplement, Plus tu me donnes perdant, plus j’me bats, plus j’répondrais présent, Mon quartier fait des vainqueurs, On grandit de nos erreurs, Mon passé est mon moteur, On grandit de nos erreurs ». Tiers monde se livre également :

 

« On s’est accroché à la vie, elle nous a donc traîné

Ces chiens nous ont condamnés ! J’l’ai assimilé

Quand j’ai perdu mon père et mon pote dans la même année

Nez à nez avec moi, je passe mon temps à vanner

Mais même quand je souris de la tristesse semble émaner

Hé, chez nous, il n’y a pas de « mi amor »

J’ai connu le poids de la vie quand j’ai porté un mort

Force et honneur, tes principes professeur

Ne jamais fritter mes sœurs, ne jamais porter de l’or

Et ces soi-disant potes n’ont pas vu ton cercueil

Ils étaient en boîte quand j’étais en deuil »

 

Tiers monde, anciennement Pad, c’est un timbre de voix facilement reconnaissable, un flow saccadé et inimitable, Le Mc rend verbalement les coups de fouet encaissés par ces ancêtres avec une plume affûtée et une écriture technique. Un grand bravo également au graphiste Koria pour le concept du fourreau en carton que l’on peut retourner pour décider du statut de l’artiste : un esclave ou un maître. L’album comprend 2 CD avec la mix tape « Black to the future » qui vous est offerte, ainsi qu’une réduction de 10euros à valoir sur les t-shirts de la marque LSA. Vous n’avez donc plus aucune excuse, vous devez vous procurer l’album immédiatement pour déterminer si vous êtes esclave ou maître de cette société.

Chronique réalisée par Anthony

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