Avant l’avènement de nos consoles de salons et ordinateurs ultra perfectionnés permettant de faire des jeux avec des graphismes et une fluidité à la limite de la réalité, un genre de jeu était incontournable et fait néanmoins de plus en plus sa disparition. En effet le point’n’click, figure emblématique des jeux PC et même console de salon, était dans les années 1990 un must have pour cette catégorie de joueurs mordue par les jeux d’aventures. Développé par Revolution Software, Les Chevaliers du Baphomet (ou encore Broken Sword en anglais) premier du nom est sorti en 1996 sur PC et Playstation et faisait partie des jeux phares appartenant au genre point’n’click. Pour ce retour aux conditions qui ont fait des Chevaliers du Baphomet une référence du genre, le 5ème opus sera-t-il à la hauteur des espérances ?
Au commencement, les Chevaliers du Baphomet met en scène un seul protagoniste, l’Américain George Stobbart, aidé d’une journaliste Française, Nicole (Nico) Collard. Cette dernière prendra d’ailleurs de plus en plus d’importance et deviendra un personnage jouable à partir du 2ème opus. En ce qui concerne les graphismes, les deux premiers étaient en 2D mais à partir du 3ème opus, Revolution Software a tenté (sans réel succès) de s’essayer à la 3D.
Le succès des Chevaliers du Baphomet repose sur un certain nombre de points : une enquête/aventure s’inspirant de divers mythes et autres points d’histoire ; la qualité des dialogues (tous les jeux de la série ont été doublés par les mêmes personnes) ; des énigmes dont la résolution passera bien souvent par des combinaisons d’objets et inspection de chaque petit détail du décor (et dont la plupart auront une solution plus ou moins loufoque) ; sans oublier l’humour pince-sans-rire de George autant dans ses pensées que dans ses commentaires !
Bref, après deux opus dont la qualité laissée envisager la fin de la série, les Chevaliers du Baphomet (comme plusieurs autres jeux tels que Mario et Sonic) décident de revenir aux sources. Exit les graphismes 3D et re-bienvenu aux bons vieux décors 2D ! Le 5ème titre, divisé en deux parties (dont nous parlerons ultérieurement), est disponible sur PC depuis le 4 décembre 2013 pour l’épisode 1 et le 17 avril 2014 pour l’épisode 2. A noter qu’il aura fallu attendre le 04 septembre 2015 pour voir débarquer le jeu sur PS4 et Xbobx One.
Ah, Paris…
On ne peut envisager un retour aux sources sans commencer ce nouveau titre à Paris avec une rencontre fortuite (d’ailleurs l’expression « comme par hasard » bercera souvent l’ensemble du jeu) entre nos personnages dans une galerie d’art trente secondes avant qu’un crime soit commis devant les yeux de George et Nico. Bien sur l’œuvre volée est assurée par la compagnie de George et il est de son devoir d’enquêter sur ce vol pendant que Nico court après le voleur. Sans oublier la petite vidéo d’introduction (qui est plutôt réussie et respecte l’univers très bande dessinée propre aux premières versions des Chevaliers du Baphomet). Voilà, le jeu commence et première constatation, les décors 2D sont vraiment beaux. On voit ensuite que les personnages sont quant à eux modélisés en 3D. L’animation est fluide mais il est à noter que cette modélisation 3D implique parfois quelques bugs d’animation ainsi qu’une petite lenteur dans les dialogues. En effet, le procédé utilisé pour cette modélisation (enregistrement sous forme de loop d’images afin de pouvoir gérer l’ensemble des résolutions des différentes plateformes sur lesquelles l’opus est adapté sans devoir refaire le travail à chaque fois) oblige les personnages à finir la boucle d’animation dans laquelle il s’est engagé avant de redire une phrase. Exemple concret, vous êtes en plein dialogue avec un PNJ, vous lui posez une question, celui-ci vous répond et d’un coup il se met à s’étirer. Et bien il faudra attendre que l’animation « PNJ s’étire » termine la boucle au complet pour que le PNJ finisse sa phrase. Cela a tendance à casser un peu le rythme sans pour autant être gravissime, après tout il s’agit ici d’un point’n’click et non pas un jeu d’action intense où chaque seconde peut être précieuse.
Toujours pour parler de lenteur, on ne peut que souligner l’effarante flegme de George (ou Nico) qui se déplace uniquement en marchant. Si vous avez plusieurs allers-retours à faire sur un tableau, prenez votre mal en patience car nos protagonistes eux prendront leur temps pour se déplacer. Bien sûr, qui dit George et Nico en présence d’un crime dit forcément implication et enquête et vous voilà dès les premières secondes du jeu à chercher des indices sur le vol afin de déterminer les motifs de ce dernier.
Jeu complet ou épisodes séparés ?
L’idée de séparer ce jeu en deux épisodes n’est pas mauvaise si on retire le fait que pour le coup, l’épisode 1 est loin d’être digne d’un Chevaliers du Baphomet en terme de scénario. Pour ce premier épisode, on se retrouve avec (n’ayons pas peur des mots), une vulgaire enquête criminelle. On est loin du mysticisme et autres investigations historiques, George et Nico ne font que rechercher la raison pour laquelle le propriétaire de la galerie a été tué et pourquoi ce tableau en particulier a été volé. Il y a bien quelques références à des éléments religieux mais traiter avec trop de désinvolture, voir même de cynisme (c’est le diableeeeee…). De même, les anciens des Chevaliers du Baphomet savent que nos deux protagonistes sont de véritables globe-trotter hors il n’est question ici que d’un petit trajet à Londres. Rassurez-vous, si on compare ce 5ème titre à une série de roman, ce premier « tome » serait celui dédié à la mise en place de l’intrigue et le deuxième « tome », l’intrigue a proprement parlé. L’épisode 2 reste sous le thème de l’enquête mais cette fois pour retrouver un objet mystique. Les voyages commencent également dans cet épisode. Depuis le 20 juin 2014, les joueurs peuvent obtenir la version complète directement sur PC, sur les autres plateformes il faudra acheter les deux épisodes séparément ce qui est plutôt dommage puisque le premier épisode, bien qu’offrant un aperçu des péripéties à venir, peut décevoir et donc peut amener à passer outre la deuxième partie (d’autant que la conclusion de ce premier épisode est à la limite du bâclage). Heureusement, la version console de salon propose immédiatement les deux épisodes. On peut noter également que 4 mois séparent ces deux épisodes et que malgré les premiers retours de la première partie de la Malédiction du Serpent, Revolution Software n’a pas corrigé certains bugs ni certaines fonctionnalités manquantes (oui, dans la deuxième partie, George et Nico n’auront toujours pas appris à courir).
Trop rapide, trop linéaire, trop facile…
Il ne vous faudra pas moins de 10h pour boucler les Chevaliers du Baphomet cinquième du nom ! La durée de vie est effectivement très courte mais se fait pardonner par un prix d’obtention relativement raisonnable (il vous faudra débourser 22,90€ pour la version PC complète, 30€ pour la version console de salon complète et 5€ par épisode pour les versions iOS et Android). Cependant le jeu en lui-même est linéaire, avec peu de fausses pistes, ce qui était monnaie courante dans les titres précédents. On peut noter l’usage de certains objets de votre inventaire qui seront utile beaucoup plus tard mais dans l’ensemble, le joueur saura presque toujours quoi faire. Lié à cet aspect linéaire, la difficulté ne se ressent pas réellement. Il n’y a quasiment pas la place aux remue-méninges intensifs car George (ou Nico) aura la fâcheuse tendance de donner des indices (quand ce n’est pas la solution) pour résoudre les énigmes. Ces énigmes ont une résolution, bien que souvent loufoque (une pensée à Marcel le cafard), qui se trouve facilement. De plus, il faudra parfois interagir avec des personnages ou des éléments du décor avec certains objets, voir même des combinaisons d’objets. Ces combinaisons auraient pu influencer la difficulté globale du jeu mais les développeurs ont préférés implémenter une fonction qui permet de griser les objets avec lesquels vous ne pouvez pas combiner l’objet que vous avez sélectionné. On dirait que tout a était fait dans le but de simplifier la vie du joueur, ce qui influe bien évidemment sur la durée de vie du jeu. Néanmoins, la difficulté est quand même augmentée entre l’épisode 1 et 2 sans pour autant changer du tout au tout cette dernière. Une source de difficulté supplémentaire découle directement du portage sur iOS et Android. Si vous décidez d’acquérir Broken Sword 5 en version application, la version proposée sur téléphone est difficile en raison de grand nombre d’éléments et personnages avec lesquelles vous pouvez interagir. Il est très difficile d’être précis sur petit écran, ces versions auront donc plus de chances d’être appréciable sur tablette. Un autre défaut (pas au sens propre du terme) de ces versions est que celles-ci sont aussi jolies graphiquement et aussi fluide que leurs homologues PC et consoles et de ce fait très gourmande en batterie, l’autonomie de votre appareil descendra en flèche lorsque vous jouez au jeu.
Des touches de nostalgie.
En excluant le retour des décors 2D ainsi que les voix doublées par les mêmes personnes, Revolution Software nous régale dans ces opus de nombreux clins d’œil aux anciens titres. Ces clins d’œil sont très bien réalisés et s’intègrent bien avec la trame du jeu. De cette façon, les néophytes ne seront pas particulièrement déroutés par ces détails (ce qui peut d’ailleurs donner envie de découvrir les anciens titres) et les anciens ne peuvent qu’apprécier ce sentiment de nostalgie lorsque des têtes ou éléments familiers apparaissent. On peut être pointilleux en ressortant le « comme par hasard » lorsque nos protagonistes rencontrent des têtes connues alors que n’importe quel PNJ aurait pu faire son apparition mais dans l’ensemble, les raisons de leurs présences collent parfaitement au scénario.
Les points positifs
- Très beaux graphismes
- Le retour aux décors 2D
- La qualité des dialogues
- L’humour toujours présent de George
- Les clins d’œil réussis
- Le Scénario qui s’étoffe tout au long du jeu
- Plutôt fluide
- L’univers de Broken Sword respecté
- Le prix
Les points négatifs
- Quelques erreurs d’animation
- La facilité globale du jeu
- La courte durée de vie
- Le bâclage des deux fins d’épisodes
- La désinscription de la salle de cardio de George et Nico…
Conclusion : 13/20
Les Chevaliers du Baphomet : la Malédiction du Serpent ravive la flamme de la série par son retour aux origines. L’histoire est plutôt bien ficelée et s’épaissit correctement au cours de la progression dans le jeu. Bien qu’il soit facile à boucler, le plaisir de découvrir (ou re-découvrir) cette série compense les quelques erreurs du jeu (notamment cette coupure en deux épisodes dont les joueurs sur console de salon seront dispensés). Les deux scènes finales transpirent le bâclage et le manque de finition mais le jeu en lui-même reste un plaisir. Les nombreux points positifs de ce cinquième opus compensent largement les points négatifs et tous, néophytes et anciens y trouveront leur compte. L’humour cynique de George, le charme de Nico et l’ensemble de cet univers qu’est les Chevaliers du Baphomet remis au gout du jour ne peuvent qu’être un plaisir à jouer.
Test réalisé par Ben